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BONUS : panorama de l’hôtellerie parisienne

APRÈS UNE BELLE ANNÉE 2023, L’HÔTELLERIE PARISIENNE ESPÈRE QUE LES JO TIENDRONT LEURS PROMESSES

Étude annuelle 2024 par Coach Omnium

Voilà enfin pour les hôteliers parisiens une belle année 2023 de confirmation de la reprise de l’activité, qui rejoint les scores de remplissage d’avant la crise du Covid.

Les questions à présent se posent à propos des retombées des JO 2024. Les prix des hôtels s’envolent, en même temps que nombreux sont les hôteliers de Paris à avoir imposé des réservations d’au minimum 3 nuits pour cette période.

En ce printemps 2024, déjà beaucoup de réservations sont annulées et il n’est pas certain que l’hôtellerie fera le plein pour ce gigantesque événement planétaire, comme ce fut le cas durant les JO de Londres.

Sans parler de l’e-réputation assassine qui risque de tomber sur les hôtels comme une pluie de grêle à cause de leur politique tarifaire, lesquels avis en ligne seront durablement en place contrairement aux bénéfices sur quelques semaines tirés des prix himalayens qui seront pratiqués.

TAUX D’OCCUPATION INSOLENTS

Les hôteliers parisiens peuvent s’éponger le front. La demande touristico-hôtelière est revenue de plus belle, après avoir regrimpé en 2022. En termes d’activité, les deux années de crise sanitaire, qui avaient mis l’hôtellerie à plat, sont oubliées, même s’il faut encore rembourser les PGE.

Avec 39,6 millions de nuitées contre 37,6 M en 2022, le taux d’occupation dans l’hôtellerie de la Capitale est remonté à 78,4 % en 2023, rejoignant les insolents niveaux de remplissage des années précédentes (sauf période Covid et attentats à Paris). Par comparaison, l’hôtellerie française, dont parisienne, a terminé l’année 2023 à 61,8 % — voir notre Panorama de l’hôtellerie en France.

Les hôtels parisiens ont absorbé 18,6 % des nuitées hôtelières françaises en 2023, alors qu’ils ne représentent que 13,2 % des chambres du parc hôtelier hexagonal.

Cette bonne reprise de la fréquentation hôtelière vient des salons, congrès et expositions qui reprennent avec force et vigueur, ainsi que de la re-fréquentation de la clientèle d’affaires et de loisirs. « L’activité des salons en Île-de-France se rapproche des niveaux d’avant-crise. Elle est équivalente à 91 % de celle enregistrée en 2019 », selon la CRT IDF.

Mais, les hausses de la fréquentation hôtelière viennent surtout par le vrai retour de la clientèle étrangère, qui pèse à nouveau (comme avant 2019) un peu plus de 2/3 (67,6 %) des nuitées, comme avant le Covid.

À Paris-Île-de-France, ce sont près de 2,7 millions d’Américains, 2,5 M de Britanniques et respectivement autour de 1,5 M d’Italiens, Allemands et Espagnols qui ont dormi dans les établissements hôteliers.

La durée moyenne de séjours a été de 1,9 jour pour la clientèle domestique et de 2,6 jours pour la clientèle étrangère, scores inchangés depuis 2015.

Une spécificité des hôtels parisiens — que l’on retrouve plus rarement ailleurs en France — est qu’il y a habituellement peu de différences dans les indicateurs de fréquentation entre chaînes intégrées et hôtels indépendants (écart de près de 1 point de taux d’occupation, seulement).

Un autre aspect, certes plus banal, est que les hébergements sont ouverts toute l’année, comme dans d’autres grandes villes.

Sur l’ensemble de l’année 2023, les taux d’occupation mensuels ne descendent jamais en-dessous de 70 % (janvier) — ce qui reste très élevé — pour atteindre un pic à 90,7 % en juin — voir graphique.

À noter que la Coupe du monde de Rugby en septembre-octobre 2023 n’a pas profité aux hôteliers. Ils ont vu leur taux d’occupation diminuer de 2,5 points en septembre par rapport au même mois de 2022 et – 5,9 points en octobre. En cause, une exagération sur les prix ? Sans aucun doute.

CHERS HÔTELS PARISIENS

Avec une imposante demande hôtelière, on se doute que les tarifs sont à nouveau hauts, pour ne pas dire stratosphériques. À présent, depuis le second semestre 2022 et en 2023, les prix des hôtels parisiens ont repris du poil de la bête, ici et là. Selon l’Office du tourisme de Paris, ces derniers ont augmenté de près de 40 % depuis 2019.

Ils ont été en moyenne plus élevés en 2023 de 45 à 65 % par rapport aux grandes villes de province, respectivement de l’économique au haut de gamme.

Il est vrai que le foncier et les coûts de construction à Paris sont chers. Bien plus lourds qu’ailleurs. Et cela devient également désormais patent dans les arrondissements de l’Est parisien et en bordure du périphérique Nord et Est, qui jusque-là avaient moins la cote. Ces surinvestissements se répercutent naturellement dans les prix des chambres, tandis que ces dernières sont en moyenne plus réduites en superficies de 20 à 30 % que celles des hôtels en province, à gammes comparables.

Mais, ces moyennes tarifaires en apparence figées, cachent évidemment la pratique généralisée du yield management (ou assimilé) avec des prix affichés qui peuvent passer sans complexe du simple au double, voire au triple ou même au quadruple (!) lors de plus en plus nombreuses dates dans l’année.

Passée la période noire du Covid aux hôtels désertés, dès l’année 2022, les bonnes ou mauvaises habitudes de l’explosion tarifaire — selon qui regarde le phénomène, les clients ou les hôteliers — sont revenues d’actualité. Notamment, lors de grands salons ou encore de Roland-Garros, par exemple. Il n’est pas sûr que cette politique tarifaire « barbare » plaise aux voyageurs pris au piège… ce que confirment les études de Coach Omnium.

Et durant les JO de 2024, cela devrait être pire pour les touristes, qui toutefois s’y attendent. UFC – Que Choisir a épinglé les hôteliers parisiens par une enquête sur les prix prévus durant l’événement. En tout, ce sont des multiplications tarifaires par 3 et jusque par 16 (!) que l’on a déjà pu observer ! On attend entre 15 et 20 millions de visiteurs rien qu’à Paris et sa région, à mettre face des près de 153.000 chambres disponibles dans les hôtels franciliens.

POLÉMIQUE AUTOUR DE LA TAXE DE SÉJOUR

Ces pratiques tarifaires en montagnes russes des hôtels parisiens, qui ne tiennent pas vraiment compte des voyageurs, n’ont pas empêché une polémique de se déployer en raison de la majoration de la taxe de séjour au 1er janvier 2024. Elle est par exemple passée de 1 € par jour et par personne à 3,25 € en hôtels 2 étoiles ou encore de 2,5 € à 8,13 € en 4 étoiles.

Les hôteliers parisiens se sont mis vent debout contre ces fortes hausses fiscales — certes navrantes — au profit d’Île-de-France Mobilités, en argumentant que ces montants vont faire fuir les touristes. Mais, comment comprendre qu’en majorant de quelques euros les taxes de séjours, les visiteurs fuiraient, tandis qu’en triplant, quadruplant voire davantage encore les prix des hôtels, les touristes ne cesseraient de venir ?

ANTI-AIRBNB EN QUESTION

La forte montée en puissance d’Airbnb à Paris depuis ces dernières années — 43.000 logements déclarés auprès de la Mairie de Paris — n’a pas affecté la demande hôtelière : voir notre dossier sur le sujet.

Hormis l’année des attentats et durant les deux années de crise du Covid, les taux d’occupation des hôtels parisiens n’ont pas chuté malgré le déploiement vitaminé d’Airbnb et de ses concurrents. Le volume de nuitées hôtelières a même gonflé depuis 2022.

Dans un même temps depuis 2014, l’offre hôtelière s’est enrichie de 8 % en nombre d’adresses. Tous ces facteurs combinés n’ont pas eu, encore une fois, d’effets sur la fréquentation des hôtels, qui est linéaire en même temps que l’arrivée d’Airbnb en France.

Les offres d’appartements meublés touchent une clientèle à part et ne forment pas significativement une concurrence à l’hôtellerie. Si c’était le cas, cela se verrait immédiatement dans les données d’activité des hôtels. Il n’en est rien. Ces deux formes d’hébergement sont plutôt complémentaires. Les premières sont adaptées pour des plus longs séjours avec une clientèle qui souvent ne choisira de toute façon pas l’hôtellerie. Les hôtels sont faits pour des courts séjours. Les polémiques alimentées par des hôteliers et des associations ou syndicats patronaux portant sur une perte de clientèle hôtelière au profit d’Airbnb ne sont donc aucunement justifiées.

En revanche, la Ville de Paris a décidé, comme de nombreuses autres grandes destinations touristiques européennes (Barcelone, Amsterdam, Prague, etc.) de sévèrement limiter l’offre des locations en courts séjours par les particuliers, et même de leur rendre la vie difficile, afin de préserver le marché de la location à l’année pour les résidents. Voire pour limiter les pollutions sonores et gênes pour le voisinage de résidents (fêtes, valises à roulettes, allers-venues dans les immeubles, etc.).

Sauf que tous ces logements seront bien utiles pour accueillir les visiteurs des JO de 2024.

UN PARC HÔTELIER QUI CONTINUE À GROSSIR

Comprenant 1.624 hôtels classés et non classés en 2024, le parc hôtelier parisien tend à augmenter lentement mais sûrement (un solde d’une centaine d’établissements de plus depuis 2014), après avoir longtemps stagné autour de 1.500 unités. Le volume de chambres disponibles croît en revanche peu. Il n’a progressé que de près de 6 % …depuis 2012. On a ouvert ou créé des hôtels en moyenne légèrement plus petits qu’auparavant. Ce qui ne sera plus le cas prochainement (voir plus loin).

La capacité moyenne des hôtels à Paris est de 53 chambres, toutes catégories comprises, contre 39 chambres au plan national.

L’hôtellerie parisienne s’est donc enrichie avec un solde de + 120 adresses depuis 2014 et + 23 entre 2023 et 2024. Sans surprise, ce sont les gammes 3 à 5 étoiles qui se développent le plus dans la Capitale : + 39 %, soit + 359 établissements depuis 2014 ! Alors que la liste des hôtels économiques et non classés fond comme beurre au four : – 41 % d’hôtels sur ce même laps de temps, soit – 239 unités. Ce qui fait dire qu’il manque des hôtels bon marché dans la capitale. Mais, ils sont compensés par des unités de ce type autour de Paris, en Petite et surtout en Grande couronne.

Comme au plan national, c’est le 4 étoiles qui grossit le plus à Paris depuis 2009.

Au total, le milieu de gamme au luxe représente 79 % des établissements hôteliers à Paris (contre 53 % en France) et 83 % du volume de chambres disponibles. Ces unités ayant en moyenne des capacités plus élevées que les hôtels économiques.

En dehors des hôtels, Paris dispose d’une offre de 72 résidences de tourisme (ou assimilés) pour 14.183 lits et 1 camping (au Bois de Boulogne).

DES ÉTOILES PARFOIS FICTIVES

Il faut noter que le classement hôtelier de 2009, actualisé en 2016 et en 2022, a favorisé le gain facile d’une étoile par rapport à l’ancienne homologation, par ses critères peu exigeants. Ainsi, par exemple, de nombreux 4 étoiles sont d’anciens 3 étoiles reclassés, sans avoir pour autant enrichi ou amélioré leur offre. La montée en gamme de l’hôtellerie parisienne n’est donc majoritairement pas de facto réelle, mais plutôt administrative, comme ailleurs en France. Elle n’est pas due non plus, dans sa globalité, à un fort taux de créations d’hôtels mais juste à une redistribution des étoiles.

Une autre particularité de l’hôtellerie parisienne est d’avoir beaucoup d’hôtels classés : près de 90 %. Tandis que seulement 75 % des établissements portent de 1 ou 5 étoiles sur le plan national (hors Paris).

12 hôtels parisiens portent la distinction « Palace » sur les 31 répertoriés en France.

DES PROJETS HÔTELIERS EN ABONDANCE !

Cette bonne santé du marché hôtelier parisien, avec des taux d’occupation presque indécents (comparés à l’hôtellerie de province) et des tarifs en bonne forme, devrait durer — sauf nouveaux événements critiques — au moins jusqu’aux JO de 2024, qui promettent encore une fois énormément de monde. Et justement, avec cette échéance et les habituels bons scores de remplissage de nombreux investisseurs sont attirés par la Ville Lumière, comme des papillons de nuit vers un lampadaire.

Outre la vingtaine de nouveaux hôtels récemment ouverts en 2023 et début 2024, on recense près d’une centaine de projets hôteliers à l’étude ou déjà en cours de construction dans Paris et la proche couronne, avec des concepts parfois inédits : lits-capsule, suites immenses, toiture habitée, cour végétalisée, lobby multifonctions…

On y trouve toutes sortes d’unités en création, allant d’un mastodonte de 700 chambres (Tour Pleyel) à des unités de chaînes ou encore des hostels.

Au total, cette expansion de l’offre hôtelière représente presque 7.000 chambres supplémentaires à venir, soit pas moins de 8 % de plus qu’actuellement sur la destination. Près de 2/3 de ces projets s’inscrivent sans surprise dans le haut de gamme et le luxe.

Le secteur de La Défense est le premier à bénéficier de ce dynamisme, devant l’est parisien (12 et 13e arrondissements) et le quartier de la porte de Versailles et du parc des expositions.

Aussi peut-on se demander avec l’annonce de ce gros volume de chambres additionnelles arrivant à court terme (constructions neuves, en bâtiments de logements ou de bureaux réhabilités, en hôtels profondément rénovés), si la situation favorable d’aujourd’hui restera identique au-delà des JO de 2024 et si les taux d’occupation ne vont pas risquer de s’écrouler par la suite. Même si le parc des Expositions a été agrandi et produira ainsi davantage de nuitées hôtelières, en clientèle internationale MICE.

Attirés par les scores étourdissants d’occupation hôtelière de la capitale, les investisseurs font la queue pour créer ou reprendre des hôtels, malgré un ticket d’entrée cher à très cher. Avec le risque — à voir — d’un déséquilibre du marché et donc un suréquipement hôtelier à partir de 2025-2026.

Mark Watkins

Les sources utilisées pour ce panorama : Insee, Atout France, Banque de France, Office du tourisme Paris, CRT Ile-de-France, Coach Omnium.

Un spécialiste reconnu du tourisme d’affaires, de l’hôtellerie et du marketing touristique

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