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BONUS : tester les innovations en hôtellerie

HÔTELIERS : FAITES-VOUS TESTER VOS INNOVATIONS PAR VOS CLIENTS ?

S’il est un sujet qui ne cesse de me surprendre, c’est bien la rareté sinon l’absence de « testage » des changements et des innovations que l’on réalise dans les hôtels, avant de les déployer.

Le meilleur exemple est celui des chambres. Lorsqu’un hôtel, mais aussi une chaîne, met au point de nouvelles chambres (rénovation, modernisation, création), on ne les voit pour ainsi dire jamais être testées par de vrais clients, en situation réelle. Nous parlons ici de chambres-témoins en fonctionnement (avec électricité, eau, etc.), une par type idéalement, avant de les généraliser à tout l’hôtel.

Se fiant à leur seuls idées, expériences et goûts, sans tenir compte des clients, les hôteliers vont ainsi diffuser des erreurs de conception et de mauvais choix de confort et d’équipement à tout l’hôtel. Et il sera trop tard pour y remédier une fois réalisés lorsqu’une majorité de clients s’en plaindront.

A QUOI ÇA SERT DE FAIRE TESTER ?

S’il existe les avis et commentaires des clients sur Internet, formant l’e-réputation, ils portent sur une offre existante, qui est déjà là. Pas sur un projet. 

Il s’agit de se rendre compte en situation concrète si l’innovation est bien imaginée et conçue pour l’usage auquel elle est prévue. C’est-à-dire — pour les chambres — confortables, ergonomiques, pratiques, fonctionnelles, protégées du bruit (la nuit), bien pensées …et tout ce qui est important pour des personnes hébergées (voir notre étude sur le sujet).

Contre toute idée reçue, il faut savoir que les clients mais aussi les collaborateurs adorent que l’on s’intéresse à eux et à leur avis.

1) – FAIRE TESTER PAR DES CLIENTS : pour le test, le principe est de faire dormir des clients toute une nuit et de leur faire utiliser la chambre en fonctionnement normal. Ce n’est pas juste de visiter l’espace à la va-vite, qui permet seulement de se rendre compte de l’esthétique des lieux et de l’équipement disponible. Ce qui a un intérêt très restreint.

2) – FAIRE TESTER PAR LE PERSONNEL D’ÉTAGE : il en va de même par rapport aux femmes de chambres et gouvernante (si elle existe). On doit leur faire analyser une ou des chambres-témoin nouvellement conçues par rapport au nettoyage, à la circulation (dont avec un aspirateur), au lit à refaire, au contrôle, etc. Cette démarche paraît être une évidence pour être sûr de la performance de productivité et de la qualité des conditions de travail. Et pourtant, on demande rarement l’avis du personnel d’étage…

• On se souvient, par exemple, de cette chaîne hôtelière très connue qui avait installé des baignoires-douches innovantes et spacieuses, avec pare-douche de verre en forme de demi-cercle, qui se refermait autour de l’usager pour faire cabine de douche. Sauf que pour nettoyer l’intérieur de la douche (fermée), la femme de chambre devait retirer ses chaussures et y entrer. Un inconvénient gênant qui a mis fin au concept pas vraiment bien imaginé par des concepteurs dans un bureau…

•  Même chose à propos d’un hôtel en front de mer à St-Malo, dont les façades vitrées offraient une vue magnifique sur la mer. Sauf qu’elles étaient sans cesse souillées par les embruns permanents accompagnant les marées hautes et les jours de vent. Dans sa conception, personne (l’architecte et l’hôtelier) n’avait pensé à la manière de laver la partie extérieure des baies vitrées des chambres, qui donnaient constamment l’impression que les vitres étaient sales (eau de mer salée et grasse). On utilisa des nacelles 2 fois par an pour le lavage, mais les vitres se resalissaient aussitôt (parfois quelques heures après). Les clients s’en plaignaient sans cesse…

Bref, il est fréquent que la création de nouvelles chambres se fasse juste entre l’hôtelier et, le cas échéant, le décorateur/architecte d’intérieur. Lequel tient rarement compte (ou n’est souvent pas au fait) de ce que les clients veulent ou aiment. Cela s’appelle du marketing de l’offre où l’on ne met pas le client (voire le personnel) au centre de la réflexion, quand il faudrait faire du marketing de la demande.

Les erreurs de conceptionparce qu’on n’a pas fait ces vérifications pourtant salutaires — sont courantes et peuvent représenter jusqu’à 60 % de surcoût pour avoir mal choisi des revêtements, des équipements, des aménagements, des agencements, des matériaux, etc. Sans parler de la déception des clients.

Dans le test, il faudrait également idéalement tenir compte des avis selon les types et variétés de clientèles, qui ont toutes, plus ou moins, des comportements de séjours et des attentes diversifiés : voyageurs d’affaires, clients de loisirs, familles, seniors, personnes seules, en couple… mais aussi selon les nationalités. On ne contente pas une clientèle américaine (traversant plusieurs pays européens avec leurs grosses valises) comme des Français, des Chinois ou des Italiens.

Le bénéfice ? Corriger les erreurs pour ne pas les commettre dans une réalisation à grande échelle et développer ainsi un produit plus juste et plus professionnel. Car il s’agit précisément de faire appel à l’intelligence des clients en situation d’utilisation et du personnel d’étages, confrontés au produit, au-delà du jugement du seul hôtelier ou/et du concepteur.

SUR LE PETIT DÉJEUNER

C’est la même chose dans une moindre mesure que pour les chambres. Il vaut mieux proposer aux clients une offre qui va leur plaire que de le leur imposer en pensant (à leur place) que ce sera parfait. Quand on sait que le café, les jus de fruits, le pain et la viennoiserie sont les plus consommés des produits du petit déjeuner (voir notre Livret sur les petits déjeuners d’hôtels) et que dans un même temps ce sont aussi les plus critiqués, voilà une occasion de mettre les clients au travail.

Il suffit de prendre un échantillon de personnes volontaires et de leur faire tester à l’aveugle plusieurs gammes/offres de cafés, de jus de fruits et de viennoiseries. Il sera alors plus facile de choisir le bon fournisseur ou les produits, en connaissance de cause de ce qui est préféré. Au lieu de juste les sélectionner sur la base de leur prix d’achat ou d’autres critères de gestionnaire. La satisfaction des clients passe par ce type de test, qui à notre connaissance, ne se fait jamais.

Demander l’avis des clients sur le buffet du petit déjeuner, voire sur l’aménagement de la salle, ne sera pas un luxe non plus. Il est alors question de présentation des produits, d’ergonomie (pour se servir au buffet), de mise en valeur du buffet, d’éclairage, de facilités de fonctionnalités (cuire un œuf, griller un toast, se servir en jus de fruit, en boisson chaude ou en en confiture en vrac…), etc.

SITE INTERNET DE L’HÔTEL

Combien de sites Internet d’hôtels ne donnent pas envie d’y réserver un séjour et même de les parcourir ? Beaucoup trop : c’est ce que disent près de 4 voyageurs sur 10 interrogés par Coach Omnium !

Maquette désolante, mauvaises photos, textes alambiqués et peu explicites, dédale pour comprendre les tarifs, trop de types de chambres, manque de fluidité, impossibilité ou complexité pour réserver en ligne… la liste est souvent longue des carences et manquements sur les sites Internet hôteliers. C’est comme si un commerçant avait une vitrine sale, mal présentée, poussiéreuse et sans rien à montrer. Cela ne donne pas envie d’y pousser la porte pour y acheter !

Résultat : on perd des demandes ou dans le meilleur des cas, les clients passent par des OTAs souvent plus convaincants et rassurants. Ce qui génère des commissions à payer quand on aurait pu recevoir des réservations en direct avec un site au top.

Ne pas présenter une belle « web-vitrine » de son hôtel coûte au final très cher. Bien plus cher que le commissionnement à remettre à des intermédiaires. Que votre site ait été réalisé par un professionnel ou par vous, ne change rien à l’affaire. L’opinion des utilisateurs est celle qui compte et qui sert d’arbitrage.

TESTING, COMMENT S’Y PRENDRE ?

D’abord, il ne faut pas avoir peur d’aborder les gens pour les « recruter » afin de réaliser un test. Généralement, s’ils en ont le temps, ils apprécient — eux aussi — qu’on leur demande leur opinion quand c’est pour faire progresser une offre et l’améliorer. C’est un acte positif, qui est différent du simple commentaire que l’on dépose à la fin d’un séjour.

Il ne faut pas non plus redouter les critiques, même si cela peut faire mal quand on s’est donné de la peine pour mettre au point une prestation.

1) – Pour faire tester la ou les chambres-témoin :

Encore faut-il en disposer. Il ne s’agit pas nécessairement de proposer un séjour gratuit aux clients testeurs, cependant tout travail mérite salaire… On peut également offrir les petits déjeuners ou proposer une réduction tarifaire. Une fois recrutés en tenant compte, encore une fois, de la diversité de la clientèle, on les convie à essayer la nouvelle chambre après les avoir briefés agréablement sur ce qu’on attend d’eux dans le testage. Une fois orientés sur cet objectif, les clients auront un sens critique affûté ! Puis, on trouve le temps de leur parler posément le lendemain, au petit déjeuner par exemple.

On ne leur fait surtout pas remplir un questionnaire, qui serait rébarbatif et trop réducteur. Il suffit de discuter à propos de ce qui leur a plu, déplu et qu’il faudrait améliorer. Cela se fera éventuellement dans la chambre également pour bien monter les sujets de critiques. Attention à ne pas uniquement choisir des clients fidèles, qui sont certes plus faciles à aborder mais souvent trop conciliants, voire très indulgents.

A noter que ce ne sont pas les appréciations qui ont trait « aux goûts et aux couleurs » qui comptent (l’esthétique) — même si cela peut compter —, mais bien celles sur les fonctions (confort, équipement, praticité, etc.) et fonctionnalités (utilisation, ergonomie…) de la chambre en usage hôtelier et non comme chez soi. On peut aimer disposer d’une offre à l’hôtel que l’on n’aimerait pas avoir chez soi.

2) – Pour faire tester les produits du petit déjeuner :

Test à l’aveugle de plusieurs produits. Même approche que pour les chambres concernant la diversité de clients.

3) – Pour faire tester le site Internet :

C’est un peu plus compliqué. Soit, on questionne les clients qui ont réservé via une OTA (Booking, Expedia…) après avoir essayé sur le site de l’hôtel (identifiés par un simple questionnement anodin au check-in), soit auprès de ceux qui ont réservé en direct. Mais, il y a des chances pour qu’ils ne se souviennent pas des détails de ce qui les a satisfait et insatisfait sur le site de votre hôtel.

Une autre méthode plus efficace, mais qui implique davantage les « testeurs » et prend plus de temps, est de leur proposer de se mettre face à un ordinateur (ou un smartphone, si le site est optimisé pour cela, ce qui est préférable) et pendant 15 à 20 minutes de les faire surfer sur le site de l’hôtel en toute liberté d’abord, pour simuler une réservation par exemple. Puis, en leur demandant de consulter les pages principales. On observe leur comportement spontané et on les questionne au fur et à mesure sur ce qu’ils perçoivent.

Externaliser : Ce travail d’étude auprès des clients sur le site Internet peut également être confié à un cabinet / consultant qui agira en toute neutralité — tel Coach Omnium. Il organisera une table ronde de clients d’hôtels (pas forcément les vôtres, mais dans la même cible) et leur fera tester plusieurs sites, dont le vôtre. Les clients se sentiront plus libres qu’en agissant devant vous dans votre hôtel. Il en ressortira de riches et crédibles critiques, suggestions et motifs d’appréciations.

LA LIMITE DES AVIS CLIENTS SUR INTERNET

Si les commentaires en ligne déposés par les voyageurs sont utiles à très utiles (tant pour les autres voyageurs que pour les hôteliers), ces derniers s’expriment souvent de façon trop restreinte ou au contraire trop générale, et pas toujours claire sur une prestation ou une autre. On ne peut pas en retirer des enseignements totalement exploitables.

Faire tester, c’est orienter sur un sujet précis et demander aux personnes de développer positivement leur esprit critique.

Par ailleurs, cela ne fonctionne pas quand il s’agit de sélectionner des produits de petit déjeuner ou encore pour faire des choix dans les aménagements de nouvelles chambres en projet, qui, par définition, ne sont pas encore commercialisées. Enfin, il est rare que les clients parlent spontanément des sites Internet des hôtels.

Les avis et commentaires en ligne d’après séjours sont différents des testages d’offres faits pour l’avenir de l’hôtel et ne les remplacent pas.

IDÉES REÇUES

Ce n’est pas parce qu’un nouveau concept ou une innovation ont été conçus par un grand designer, par un groupe hôtelier connu ou par un architecte réputé que cela sera forcément un succès auprès de la clientèle. On ne compte plus les bêtises — souvent irréparables — que les professionnels, même expérimentés et à forte notoriété, ont pu commettre en hôtellerie.

On pense à la salle de bains ouvertes sur la chambre, aux bornes d’accueil de check-in sans personnel, aux hôtels sans réception avec envoi d’un code sur smartphone avec le numéro de la chambre, au coworking payant dans le hall de l’hôtel, aux ventes de services de proximité destinées aux voisins de l’établissement, aux chambres pour ados, aux critères du classement hôtelier… des prestations au succès très mitigé qui n’auraient pas été lancées si on avait interrogé des utilisateurs avant.

COMBIEN ÇA COÛTE ?

Rien à presque rien, sauf si on invite les clients testeurs à séjourner gratuitement dans la chambre à essayer, ce qui serait un joli cadeau pour les clients fidèles à qui on demande une contribution pour améliorer son offre. En revanche, cela demande un investissement en temps, le culot d’aborder les « testeurs » potentiels et le courage de tout entendre.

De mon point de vue, le testage d’offres avant leur lancement — par de vrais clients —, quasiment jamais pratiqué en hôtellerie, semble être un bon outil de perfectionnement et le moyen d’éviter par anticipation beaucoup d’erreurs que l’on voit trop souvent dans les hôtels.

Tester des innovations en hôtellerie auprès des clients peut être crucial pour garantir le succès de ces nouvelles idées. Voici quelques étapes à suivre pour effectuer des tests avec les clients :

En résumé, LA DÉMARCHE COMPLÈTE SUR LES INNOVATIONS À TESTER 

Déterminez les innovations spécifiques que vous souhaitez tester. Cela pourrait inclure de nouvelles technologies, des services améliorés, des expériences personnalisées, etc.

  1. – Segmentation de la Clientèle : Identifiez les segments de clientèle les plus susceptibles de bénéficier ou d’apprécier les innovations que vous testerez. Cela peut vous aider à cibler les personnes qui seront les plus influentes dans le processus de test.
  2. – Communication Transparente : Informez vos clients de manière transparente sur l’expérimentation en cours. Expliquez-leur les avantages potentiels des innovations que vous testez et sollicitez leur avis.
  3. – Création d’un Groupe de Testeurs : Sélectionnez un groupe de testeurs volontaires parmi vos clients. Vous pouvez encourager leur participation en offrant des avantages, comme des réductions, des services gratuits ou des avantages exclusifs.
  4. – Recueil d’Avis Préalables : Avant de mettre en œuvre pleinement l’innovation, recueillez les avis préalables des clients sur leurs attentes, leurs préoccupations et leurs suggestions. Cela peut se faire via des sondages, des entretiens ou des groupes de discussion. Le mieux est encore de lire toutes nos études sur les attentes des clientèles hôtelières, dans la rubrique « BONUS ».
  5. – Phase Pilote Restreinte : Implémentez l’innovation à petite échelle dans une phase pilote. Cela peut être dans quelques chambres, sur un étage ou dans un certain secteur de votre établissement. Cela vous permet de surveiller de près les réactions initiales.
  6. – Collecte de Données : Collectez activement des données pendant la période de test. Cela peut inclure des retours directs des clients, des analyses d’utilisation de la nouvelle innovation, des enquêtes post-expérience, etc.
  7. – Adaptations en Temps Réel : Soyez prêt à apporter des ajustements en temps réel en fonction des retours clients. Cela démontre que vous prenez en compte leurs opinions et que vous êtes disposé à améliorer l’offre/prestation en fonction de leurs besoins.
  8. – Évaluation Globale : À la fin de la période de test, effectuez une évaluation globale en comparant les résultats attendus aux résultats réels. Cela vous aidera à décider si l’innovation est prête à être déployée à grande échelle ou si des ajustements supplémentaires sont nécessaires.
  9. – Communication des Résultats aux Clients : Informez les clients des résultats de l’expérimentation, des changements effectués en fonction de leurs commentaires, et de la manière dont leurs opinions ont contribué à l’amélioration de l’expérience hôtelière.

Mark Watkins

Un spécialiste reconnu du tourisme d’affaires, de l’hôtellerie et du marketing touristique

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